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L'affaire dite "Malamud" est entrée dans sa troisième phase ! La demande de deux organisations d'accéder gratuitement aux normes harmonisées a été rejetée en juillet 2021 devant le Tribunal de l'Union européenne (TUE) au titre de la protection de la propriété intellectuelle (les normes sont créées par les organismes de normalisation en vertu du droit d'auteur). Après l'appel de l'arrêt, la recommandation de l'avocat général de l'UE Medina a suivi : les normes harmonisées font partie du droit de l'Union, l'application de ces documents doit être assimilée au respect des règles obligatoires. Cet arrêt a été confirmé par la CJUE le 5 mars 2024 dans un communiqué officiel. En réaction, les organismes nationaux de normalisation ont mis en place des plates-formes de lecture sur lesquelles seules les éditions nationales des quatre normes faisant l'objet de la procédure peuvent être consultées gratuitement.
Arrêt de la CJUE du 5 mars 2024
La Cour de justice des Communautés européennes a annoncé que l'accès aux 4 normes harmonisées demandées par la partie plaignante (notamment en vertu de la directive 2009/48/CE relative aux jouets), dont il était question dans l'affaire, devait être accordé. La décision initiale de la Commission de refuser la communication des documents est annulée. La Cour rappelle ici que tout citoyen de l'UE et toute personne physique ou morale doivent avoir accès aux documents détenus par la Commission européenne. Dans l'affaire en question, les documents demandés font partie du droit de l'UE, étant donné que la Commission européenne confère à ces normes une valeur juridique par leur publication au Journal officiel de l'UE. En vertu du principe de l'État de droit et du libre accès à la justice, la CJUE affirme que les citoyens devraient se familiariser avec le contenu des normes afin de pouvoir vérifier si un produit répond aux exigences de la législation sous-jacente. Cet effet juridique conféré par la législation précitée est l'une des caractéristiques essentielles de ces normes et en fait, pour les opérateurs économiques, un instrument indispensable à l'exercice du droit à la libre circulation des biens et des services sur le marché de l'UE. Il en résulte un intérêt public supérieur pour les normes harmonisées au sens de l'article 4, paragraphe 2, dernière phrase, du Règlement n° 1049/2001, qui justifie la divulgation des normes harmonisées demandées.
Interprétations de l'arrêt
L'arrêt est interprété par les organismes de normalisationcomme ne remettant pas en cause le fait que les normes harmonisées sont protégées par le droit d'auteur.1 L'un des principaux arguments des requérants et de l'avocat général était la suppression générale de cette protection, ce qui aurait signifié l'accès gratuit à tous les documents. En outre, il n'est pas question de remettre en cause le fait que l'accès aux documents dans le cadre du Règlement 1049/2001 se fait sans préjudice des dispositions existantes en matière de droit d'auteur qui peuvent limiter le droit des tiers de reproduire ou d'utiliser des documents divulgués.
En revanche, les avocats des plaignants voient dans l'arrêt une "réorganisation complète du système européen de normalisation".2 Sur la base de l'arrêt, un accès gratuit devrait être accordé à toutes les normes harmonisées publiées dans un Journal officiel de l'UE. Selon eux, cela signifierait que la Commission européenne devrait "accorder un accès gratuit à toutes les normes harmonisées", étant donné que ces documents font partie du droit de l'UE.
Résumé de l'arrêt
Les conséquences possibles
Avant l'arrêt de la CJCE, on avait déjà beaucoup parlé des conséquences d'un éventuel jugement. Un accès gratuit aux normes harmonisées pour le grand public représenterait un changement de paradigme dans la normalisation européenne. Les conséquences pourraient être les suivantes:
Réaction de la Commission européenne: Portail pour l'accès en lecture seule
A la fin du mois d'avril, Kerstin Jorna, directrice générale de la Direction du marché intérieur, de l'industrie, de l'entrepreneuriat et des PME, a annoncé que l'on travaillait à une approche commune pour l'exécution de l'arrêt3. Selon ce projet, le libre accès à certaines normes harmonisées devrait se faire dans le cadre de « plates-formes de lisibilité » spéciales.
Le lancement de telles plates-formes a eu lieu début septembre en collaboration avec les différents organismes de normalisation3. Ainsi, DIN met à disposition pour l'Allemagne un « Liste des normes harmonisées », sur lequel les transpositions nationales des textes intégraux de certaines normes harmonisées sont mises à disposition du public européen. Après enregistrement, les utilisateurs ont accès aux 4 normes qui ont fait l'objet de l'arrêt : EN 71 avec les parties 4, 5 et 12 (sécurité des jouets) et EN 12475 (essais d'abrasion et de corrosion simulés) dans les éditions nationales correspondantes, sachant qu'à l'exception de la norme EN 71-5, toutes les éditions des normes ont entre-temps déjà été retirées ainsi que des Journaux officiels de l'UE conformément au règlement relatif aux jouets ou au règlement REACH. Cet accès s'effectue exclusivement en lecture seule et exclut le téléchargement et la diffusion du contenu des normes sous quelque forme que ce soit ; les droits d'auteur restent la propriété de l'organisme national de normalisation.
Chronologie des événements
Nous suivons de près les résultats de l'arrêt du tribunal et allons immédiatement vérifier dans quelle mesure il y a des conséquences pour la mise à disposition de normes en texte intégral sur le Safexpert Live Server. En l'état actuel des choses, seule la publication des 4 normes harmonisées aux plaignants est concernée par le jugement actuel. Il n'est pas clair dans quelle mesure l'affaire constitue un précédent pour d'autres actions de ce type, par exemple pour les normes harmonisées selon la directive sur les machines. Dans notre newsletter, le CE-InfoService (en anglais), nous vous informons immédiatement dès que nous disposons de nouveaux éléments sur ce sujet.
Les lecteurs intéressés peuvent consulter l'intégralité arrêt de la Cour sur le site de la Cour de justice européenne (CJCE). Vous y trouverez également un communiqué de presse sur l'affaire.
Notes de bas de page:1 Voir Déclaration du CEN/CENELEC sur l'arrêt du 5.3.2024
2 Voir Communiqué de presse des avocats de Public.Resource.Org, Inc. et Right to Know CLG
3 Voir Portails d'accès en lecture de Austrian Standards et DIN Media
Rédigé le : 11.09.2024 (dernière modification)
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